Qui fait encore confiance aux grandes marques de l’agroalimentaire qui recherchent le profit à court terme au détriment de la santé et de l’environnement ? Les consommateurs sont dupés, constamment et depuis longtemps. Aujourd’hui mieux informés, de plus en plus d’entre eux tentent au maximum de privilégier les produits frais et plus sains, de saison, au marché en circuit court. La méfiance des consommateurs est à un niveaux jamais observé auparavant. Leurs habitudes alimentaires évoluent, plus vite qu’il n’y parait… et avec elles, se dessinent les contours d’un monde meilleur.
Habitudes alimentaires : les consommateurs créent le monde de demain
Le monde change. Il ne change certainement pas assez vite au goût de certains, et bien trop rapidement pour d’autres. Peu importe l’appréciation que chacun en fasse, cette transformation de la société est en marche et ne semble pas devoir s’arrêter demain compte tenu des scandales à répétition dans le monde de l’agroalimentaire : produits frelatés, contaminés, cancérigènes, pesticides, insecticides ; sans compter l’abondance et la généralisation des édulcorants, conservateurs, arômes artificiels, et autres produits dangereux… « STOP on en veut plus ».
Ce qui est remarquable, c’est que cette transformation de la société s’opère depuis la base. Vous, moi, lui, elle et nous, sommes les principaux acteurs de ce changement. Une fois de plus, il faut se rendre à l’évidence : nos gouvernants n’apportent pas de solution. Pire encore, ils sont complices du système à produire de l’argent, aux dépends de la santé publique et de la planète. Pourtant chacun d’eux sait. Pour preuve : des pays passent entièrement à l’agriculture bio quand d’autres visent le zéro pétrole. Ils savent. Tous savent. Seulement certains dirigeants agissent.
Ce qui est rassurant, c’est que ce nombre de gens qui consomment en conscience ne cesse d’augmenter. Comment pourrait-il en être autrement avec le développement de l’information libre produite et accessible par internet? Rassurant, car personne n’a assez de pouvoir pour stopper ou d’inverser la tendance actuelle qui s’accélère. La part du bio, les circuits courts, les petits producteurs… chacun y va de son explication et de sa solution, adapté à son cas. Voici différents témoignages, de vrais gens ayant identifiés des vrais problèmes, ont trouvés des vrais solutions. Ils racontent leur démarche:
Mondialisation alimentaire, par David, 43 ans, consultant marketing senior freelance, Paris:
L’alimentation a subi la mondialisation au même titre que les autres secteurs d’activité. Vous pouvez aujourd’hui acheter un paquet de chips de la même marque dans tout l’Occident. Economie d’échelle pour les industries agroalimentaires, uniformisation des modes de consommation pour les consommateurs. Cette exemple s’applique à toute l’alimentation humaine.
Cela étant, au-delà des problèmes sanitaires générés par la course au profit aussi bien que par des contrôles défaillants, je n’ai aujourd’hui plus aucune confiance en des entreprises — transnationales pour la plupart — qui, non contentes d’optimiser fiscalement leur activité au détriment des Etats et donc des peuples, semblent marcher main dans la main avec l’industrie pharmaceutique… En effet, quelle aubaine de pouvoir d’un côté rendre malade les consommateurs, et de l’autre leur proposer des produits pour lutter contre ces maux ! A titre personnel je prépare un maximum de mes aliments et privilégie les circuits courts, aussi bien pour des questions environnementales que pour favoriser des entreprises à taille humaine qui font partie intégrante de la société et de son marché, taxe et emploi locaux inclus.
Une industrie néfaste pour la santé et l’environnement, par Pierre, 31 ans, Bordeaux
Je ne leur fais plus confiance en raison d’un principe simple. Tout ce qui est produit à échelle industrielle est par essence conçu pour se conserver dans le temps et être vendu à la plus grande quantité possible pour maximiser le profit.
Or, ces deux éléments impliquent dans les ingrédients du produit vendu : 1) des conservateurs ; 2) des ingrédients à base de sucre et glucose sous diverses formes, qui touchent une zone du cerveau qui favorise la dépendance, exactement de la même manière qu’une drogue.
Enfin, concernant le packaging, tout est à revoir. Non seulement, c’est polluant pour l’environnement et l’océan en particulier, mais en plus c’est néfaste pour l’homme, comme on le voit tous les jours en apprenant les effets dévastateurs du bisphénol A et des phtalates sur notre corps, et notamment la qualité du sperme de l’homme, et les malformations de nouveau-nés chez les femmes. Et ce alors qu’il existe des fournisseurs français de packagings 100 % biodégradables et écologiques, élaborés à partir d’algues en Bretagne, algues dont on ne sait plus que faire ! Pour toutes ces raisons, je boycotte au maximum les supermarchés et les grandes marques. Je ne me fournis que directement auprès des maraîchers, de mon potager et sur les marchés locaux. Question de principe et, surtout, d’éthique.
Des produits centrés sur le coût, par Philippe, 66 ans, retraité
Ancien PDG de trois usines agroalimentaires fournissant des fabricants de produits tels que pâtes, biscuits, charcuteries, et parmi les plus grands (Danone), je ne me souviens pas d’avoir jamais abordé autre chose que le prix. Bien sûr il y a des cahiers des charges, qui la plupart du temps ne sont d’ailleurs pas réalistes et servent uniquement de parapluie en cas de pépins, des certifications CEE, ISO, etc., qui ne sont que des bouts de papiers récompensant des procédures qui n’existent que le temps de leur obtention.
Dans la pratique, les usines, et même les plus grosses, se moquent de la qualité et ne regardent que la ligne profit. Certains industriels, sous couvert de températures de cuisson élevées, n’hésitent pas à utiliser des produits périmés, contaminés ou cent fois reconditionnés. Quand il y a un lot de matières premières avariées, il y a toujours plus d’acheteurs intéressés. Quand aux contrôles, les fraudes et les services vétérinaires sont débordés, souvent inefficients, et surtout pas regardants. En dix ans, sur mes trois usines, je n’ai jamais eu un vrai contrôle, mais par contre beaucoup de déjeuners.
Appétits financiers, par Jean
Je n’ai absolument aucune confiance envers les marques de l’industrie agroalimentaire dont le seul but est de satisfaire leurs appétits financiers. Les consommateurs sont sciemment dupés, abusés et rendus captifs par les campagnes de marketing (désinformation) toujours plus performantes et destinées à sanctifier les marques de l’industrie agroalimentaire. La bonne santé des consommateurs, la juste rémunération des producteurs, le respect de notre environnement ne sont pas compatibles avec la logique d’augmentation des parts de marché et des bénéfices de l’empire agroalimentaire. L’étiquetage des produits ne vise en aucun cas à informer honnêtement les consommateurs, le lobby agroalimentaire œuvrant pour que la réglementation lui soit la moins contraignante possible sur ce point.
En tant que consommateurs, nous avons le choix de ne pas contribuer aux effets néfastes de cette industrie, en modifiant notre approche de l’alimentation. Nous devons autant que possible prendre le temps de cuisiner nous même nos repas en privilégiant les produits frais issus de circuits courts. Et pourquoi ne pas profiter d’un bout de jardin ou d’une terrasse pour faire un coin potager ?
Perte de notre patrimoine alimentaire, par Dominique, 32 ans, Paris, chargé de mission
L’industrie agroalimentaire française est triplement coupable. Un, elle vend des produits frelatés, truffés de produits chimiques variés, emballés dans des plastiques polluants et dangereux pour la santé. Deux, elle détruit l’environnement en incitant l’utilisation de produits agricoles qui engendrent pollution de l’environnement, souffrance animale et atteinte à la santé des agriculteurs et des riverains. Trois, elle détruit le patrimoine culinaire français, les savoir-faire, le bien-manger et fait son beurre en propageant l’obésité. Je suis très choqué de la collaboration soumise du pouvoir politique à ces industries alors même que notre pays est le plus talentueux en la matière. Vive les petits producteurs, les cuisiniers et tous les réseaux alternatifs qui organisent la résistance face à cette industrie qu’il faudrait détruire à coup de taxes pour lui faire payer les conséquence sanitaires de son activité immorale.
Il est inutile de manger en février des tomates sans saveur, par Jean, 68 ans, La Roche-sur-Yon
Bien avant les scandales alimentaires, je m’étais rendu compte des arnaques : prix maintenus mais moins de produit (Prince…). J’avais aussi acheté des produits sous plastique : jambon blanc, mozzarella, etc. dont le paquet gonflait anormalement, mais aussi du fromage sans goût et d’autres articles avec trop de sel, trop de sucre. Le chorizo désormais bien trop pimenté et immangeable ! Les étiquettes ne résolvent pas les problèmes de qualité, et j’en avais assez de passer mon temps à lire des textes illisibles ou nébuleux. J’en avais assez aussi de remplir mes poubelles avec des plastiques de toutes sortes en me posant les questions de la santé et de l’environnement.
Depuis quelques années je consomme local et je privilégie les produits frais et de saison. Il est inutile de manger en février des tomates bien rondes mais sans saveur. Depuis quelques années, je fais un jardin, et les légumes que je mange (à la saison) sont délicieux et sans comparaison possible avec ceux des hypermarchés. J’achète ma viande chez un boucher et je crois que j’y gagne car elle ne rétrécit pas à la cuisson et elle est bien meilleure. Pour moi je n’achète que les produits de base (farine, sucre, etc.) dans les grandes surfaces et surtout pas de produits de l’agroalimentaire. Non, ces produits sont mauvais ou sans goût, et je n’ai aucune confiance en leur qualité et leur effet sur la santé. Non merci, sans façon !
Ma volaille et mes légumes sont produits dans un rayon de 40 km, par Jean, 40 ans, profession libérale en Ile-de-France
L’industrie agroalimentaire n’est pas tenue de participer à notre santé. Son objectif premier est de développer avant tout son chiffre d’affaires. Partant de ce constat, j’ai décidé de me montrer très méfiant envers ses produits. Aujourd’hui, j’achète tous mes produits frais (légumes et fruits, viandes et fromages) au marché en sélectionnant des artisans de qualité et les circuits courts. Ma volaille et mes légumes sont produits dans un rayon de 40 kilomètres par exemple. Je me rends à présent au supermarché uniquement pour les achats de produits ménagers, quelques conserves (pois chiches ou sardines par exemple), les biscuits, en prenant soin de toujours détailler les ingrédients (je fuis comme la peste la mention « arômes » et la ribambelle de colorants en E). En quelque sorte, je n’achète que les produits les plus simples ayant subi le strict minimum de mise en œuvre.
Selon moi, l’essentiel des produits diffusés par l’industrie agroalimentaire est malsain pour notre santé. Il suffit, pour s’en convaincre, de détailler la liste des ingrédients. On imagine pas à quel point nos industriels sont inventifs en termes d’intrants chimiques alimentaires. Il y aurait un gros travail à faire sur l’étiquetage (ingrédients sains et malsains, traçabilité, empreinte carbone…) afin d’aider (éduquer ?) au mieux les familles. Je pense aux enfants.
Depuis le scandale de la viande de cheval, j’ai changé d’alimentation, par Rachel, 20 ans, Les Herbiers (Vendée)
Depuis le scandale de la viande de cheval, ma famille et moi-même avons considérablement changé notre alimentation. Nous n’achetons plus du tout de viande en supermarché ni de légumes ou autres produits alimentaires. Nous mangeons beaucoup moins de viande, et lorsque cela se produit nous l’achetons chez notre boucher au marché ! Désormais, le marché est devenu notre seul lieu d’achat pour fruits, légumes, viandes et poisson. Tellement plus convivial ! Les scandales alimentaires mettent seulement des exemples sur ce que nous connaissons déjà ; il est nécessaire d’intervenir désormais.
Notre consommation doit changer, rien que par respect pour les animaux et la nature. Il m’est impossible de manger dans des restaurants rapides désormais.
Je mange bio depuis quinze ans, par François, Paris, 40 ans
Lorsqu’on sait que Rudolf Steiner avait déclaré en 1919 qu’une vache mangeant des protéines animales explosait son taux d’urate et devenait folle et que ce n’est qu’en 1999 que les farines funestes furent enfin interdites, on mesure le pouvoir de l’industrie agroalimentaire et de sa démarche définitivement meurtrière en ne pensant jamais au consommateur mais toujours à ses profits et aux dividendes des membres du conseil d’administration. Je cite cet exemple effarant mais tout le monde en connaît une bonne dizaine.
Depuis quinze ans je mange bio et me désole de l’appauvrissement des goûts (toujours plus de sucre et de sel) et m’inquiète de l’état dramatique de la terre, de nos eaux, de notre air que l’agriculture intensive pollue toujours plus. Les conséquences sont connues, établies : maladies cardio-vasculaires, diabète, cancers… J’en veux à toutes les personnes qui ont de l’argent et qui pourraient acheter bio, augmentant ainsi la demande qui inciterait les agriculteurs à se convertir, donc modifieraient l’offre, de sorte qu’à terme, ce ne soient plus seulement 2 % du territoire cultivés mais bien davantage de superficies, afin que les personnes modestes puissent y accéder également, enfin, sans que l’argent soit un frein à leur désir de nourrir sainement leur famille. Je connais tous les argumentaires des « antibiologiques » ; aucun ne résiste à la force de « l’habitude » du consommateur ne désirant fondamentalement pas changer sa consommation!
Je suis devenu plus vigilant aux étiquettes, par Lionel, 44 ans, informaticien
En une dizaine d’années, je suis passé de la consommation automatique (je prends un produit, je pose dans le Caddie) à la consommation temporisée (je prends un produit, je lis l’étiquette, je valide ou non mon choix). Au fur et à mesure de mes lectures, des différents reportages télé, des scandales incroyables touchant aux industries agroalimentaires, ma sensibilité s’est accrue, ma curiosité également, ma révolte certainement un peu aussi. Je suis donc devenu plus vigilant.
Ayant conscience que se passer de produits agroalimentaires serait difficile pour moi (j’ai néanmoins éliminé tous les plats cuisinés), je tente d’acheter plus intelligent en me basant sur les informations des étiquettes. Taux de sucres ou de gras saturés, arômes naturels ou artificiels, produit bio ou responsable, mes choix sont plus précis. J’ai été très désappointé lorsque Bruxelles a décidé de ne pas valider les mentions informatives selon le système du feu tricolore. Par ailleurs, je ne me leurre pas : ma prise de conscience et ma vigilance relative me permettent aussi de me donner bonne conscience. Je possède par exemple une machine Nespresso. Je savais parfaitement que ce café dit de luxe laisse une empreinte environnementale négative largement supérieure au café traditionnel. Et pourtant, je l’ai achetée…
J’ai retrouvé le lien avec l’animal, par Yann, 24 ans, Paris
J’ai eu une sorte de révélation il y a quelques mois en achetant du jambon dans un supermarché. En le prenant, je l’ai regardé et me suis dit : « Je ne vois pas le cochon, je vois le jambon. » Je n’ai plus de lien avec l’animal, le jambon est du jambon, pas du cochon. Pour la première fois, je me suis rendu compte que la facilité d’accès à la viande était tellement évidente que je ne l’avais jamais remise en question. Malaise. En me renseignant un peu, j’ai pu commencer à mettre des mots et des maux sur ce malaise ; il y a quelque chose de culturel dans la disponibilité et l’accès facile et à bas coût qui facilite la dépendance, l’achat compulsif.
Face à l’opacité de l’industrie porcine (mais pas que porcine) un peu partout dans le monde, à ce qui arrive à en filtrer malgré tout, à l’étouffement des différents partenaires et la mainmise sur le marché, je me suis dit que je ne pouvais pas continuer de soutenir aveuglément une agriculture rendue folle par le productivisme et le rendement. Je suis devenu « végérisien », végétarien à Paris. J’applique le principe de précaution en n’achetant de la viande que quand je suis sûr de sa traçabilité et que je suis d’accord avec son mode de fabrication, c’est-à-dire quasiment jamais (Rungis, France, trop flou donc non). Mais quand je rentre chez mes parents en Bourgogne, c’est la fête ! Je redécouvre le plaisir de manger de la bonne viande en en mangeant beaucoup moins souvent.
L’immense pouvoir des consommateurs, par Jean
Le mauvais comportement des agro-industriels n’est plus a démontrer et le débat n’est plus là. Maintenant il faut avancer et passer de la dénonciation à l’action. Pour cela, chacun a un rôle à jouer sans forcément le savoir. Les consommateurs ne se rendent pas compte de l’immense pouvoir qu’ils détiennent en choisissant de consommer ou de ne pas consommer. Si tout le monde se met à ne plus acheter de mauvais produits, alors seuls ceux de qualité resteront, c’est la simple loi de l’offre et de la demande! La solution viendra du porte-monnaie!
Source des témoignages : lemonde.fr
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