« Quelle planète laisserons-nous à nos enfants ? » La question est posé par Pierre Rabhi dans la Charte Internationale pour la Terre et l’Humanisme qu’il a écrite. Il y fait le constat des cinq dangers majeurs encourus par notre planète et par l’humanité. L’autre question posée est « quels enfants laisserons-nous à notre planète ? », pour tenter d’y répondre, Pierre Rabhi fait sept propositions pleines de bon sens.
Planète en danger : 7 propositions de Pierre Rabhi pour Vivre et prendre soin de la vie
La planète terre est à ce jour la seule oasis de vie que nous connaissons au sein d’un immense désert sidéral. En prendre soin, respecter son intégrité physique et biologique, tirer parti de ses ressources avec modération, y instaurer la paix et la solidarité entre les humains, dans le respect de toute forme de vie, est le projet le plus réaliste, le plus magnifique qui soit.
Constat : La Terre et l’Humanité sont gravement menacées
Quelle planète laisserons-nous à nos enfants ?
Constat 1 : Le désastre de l’agriculture chimique
L’industrialisation de l’agriculture, avec l’usage massif d’engrais chimiques, de pesticides et de semences hybrides et la mécanisation excessive, a porté gravement atteinte à la terre nourricière et à la culture paysanne. Ne pouvant produire sans détruire, l’humanité s’expose à des famines sans précédent.
Constat 2 : L’humanitaire à défaut de l’humanisme
Alors que les ressources naturelles sont aujourd’hui suffisantes pour satisfaire les besoins élémentaires de tous, pénuries et pauvreté ne cessent de s’aggraver. Faute d’avoir organisé le monde avec humanisme, sur l’équité, le partage et la solidarité, nous avons recours au palliatif de l’humanitaire. La logique du pyromane-pompier est devenue la norme.
Constat 3 : La déconnexion entre l’humain et la nature
Majoritairement urbaine, la modernité a édifié une civilisation « hors-sol », déconnectée des réalités et des cadences naturelles, ce qui ne fait qu’aggraver la condition humaine et les dommages infligés à la terre.
Constat 4 : Le mythe de la croissance illimitée
Le modèle industriel et productiviste sur lequel est fondé le monde moderne prétend appliquer l’idéologie du « toujours plus » et la quête du profit illimité sur une planète limitée. L’accès aux ressources se fait par le pillage, la compétitivité et la guerre économique entre les individus. Dépendant de la combustion énergétique et du pétrole dont les réserves s’épuisent, ce modèle n’est pas généralisable.
Constat 5 : Les pleins pouvoirs donnés à l’argent
Mesure exclusive de prospérité des nations classées selon leur PIB et PNB, l’argent a pris les pleins pouvoirs sur le destin collectif. Ainsi, tout ce qui n’a pas de parité monétaire n’a pas de valeur et chaque individu est oblitéré socialement s’il n’a pas de revenu.
Mais si l’argent peut répondre à tous les désirs, il demeure incapable d’offrir la joie, le bonheur d’exister…
Propositions pour : Vivre et prendre soin de la vie
Quels enfants laisserons-nous à la planète ?
Proposition 1 : Incarner l’utopie
L’utopie n’est pas la chimère mais le « non lieu » de tous les possibles. Face aux limites et aux impasses de notre modèle d’existence, elle est une pulsion de vie, capable de rendre possible ce que nous considérons comme impossible. C’est dans les utopies d’aujourd’hui que sont les solutions de demain. La première utopie est à incarner en nous-mêmes car la mutation sociale ne se fera pas sans le changement des humains.
Proposition 2 : La sobriété heureuse
Face au « toujours plus » qui ruine la planète au profit d’une minorité, la sobriété est un choix conscient inspiré par la raison. Elle est un art et une éthique de vie, source de satisfaction et de bien-être profond. Elle représente un positionnement politique et un acte de résistance en faveur de la terre, du partage et de l’équité.
Proposition 3 : Le féminin au cœur du changement
La subordination du féminin à un monde masculin outrancier et violent demeure l’un des grands handicaps à l’évolution positive du genre humain. Les femmes sont plus enclines à protéger la vie qu’à la détruire. Il nous faut rendre hommage aux femmes, gardiennes de la vie, et écouter le féminin qui existe en chacun d’entre nous.
Proposition 4 : L’agroécologie, alternative indispensable
De toutes les activités humaines, l’agriculture est la plus indispensable car aucun être humain ne peut se passer de nourriture. L’agroécologie que nous préconisons comme éthique de vie et technique agricole permet aux populations de regagner leur autonomie, sécurité et salubrité alimentaires tout en régénérant et préservant leurs patrimoines nourriciers.
Proposition 5 : La Terre et l’humanisme indissociables
Nous reconnaissons en la terre, bien commun de l’humanité, l’unique garante de notre vie et de notre survie. Nous nous engageons en conscience, sous l’inspiration d’un humanisme actif, à contribuer au respect de toute forme de vie et au bien-être et à l’accomplissement de tous les êtres humains. Enfin, nous considérons la beauté, la sobriété, l’équité, la gratitude, la compassion, la solidarité comme des valeurs indispensables à la construction d’un monde viable et vivable pour tous.
Proposition 6 : La relocalisation de l’économie
Produire et consommer localement s’impose comme une nécessité absolue pour la sécurité des populations, leurs besoins élémentaires et légitimes. Sans se fermer aux échanges complémentaires, les territoires deviendraient alors des berceaux autonomes valorisant et soignant leurs ressources locales. Agriculture à taille humaine, artisanat, petits commerces… devraient être réhabilités afin que le maximum de citoyens puissent redevenir acteurs de l’économie.
Proposition 7 : Une autre éducation
Nous souhaitons de toute notre raison et de tout notre cœur une éducation qui ne se fonde pas sur l’angoisse de l’échec mais sur l’enthousiasme d’apprendre. Qui abolisse le « chacun pour soi » pour exalter la puissance de la solidarité et de la complémentarité. Qui mette les talents de chacun au service de tous. Une éducation qui équilibre l’ouverture de l’esprit aux connaissances abstraites avec l’intelligence des mains et la créativité concrète. Qui relie l’enfant à la nature à laquelle il doit et devra toujours sa survie et qui l’éveille à la beauté et à sa responsabilité à l’égard de la vie. Car tout cela est essentiel à l’élévation de sa conscience.
Une charte pourquoi faire ?
Après avoir lu ces cinq constats alarmants et les sept propositions s’y rapportant, peut-on encore faire comme si de rien n’était ?
Certains ont déjà pris conscience des dysfonctionnements sociétaux abordés par Pierre Rabhi. Vous en faites probablement partie, sans quoi vous ne seriez pas à la fin de cet article, à en lire la conclusion. Si chacun prend conscience et adopte un style de vie qui s’en tient à la raison plus qu’aux habitudes néfastes : le monde change. Autrement dit, chaque contribution individuelle est une partie de la solution globale. Chacun est le changement.
Document : la Charte Internationale pour la Terre et l’Humanisme du mouvement COLIBRIS
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